Réforme des retraites : la culture de responsabilité

En 2017, Emmanuel Macron avait proposé aux syndicats et au patronat de faire évoluer les relations entre eux  vers plus de partenariat à la mode scandinave. Les patrons avaient refusé parce qu'il ne sentaient pas les syndicats en France prêts à s'engager dans un partage des responsabilités.

Or en France, nous avons des grandes écoles qui trustent les meilleures places dans les classements européens mais qui fabriquent des managers médiocres du genre de Didier Lombard qui a évité la case prison de justesse et à qui on doit la création d'une nouvelle notion juridique : le harcèlement moral institutionnel. Dans ces écoles, on célèbre l'efficacité dans un utilitarisme tout benthamien  au détriment d'un bien commun raisonné et à 40 ans, les anciens étudiants devenus cadres démissionnent de leurs emplois bien payés pour retrouver l'estime d'eux-même.

En France, les syndicats n'ont peut-être pas la culture de responsabilité mais les managers  ne l'ont pas non plus et entre eux le fossé est profond.

Le syndicalisme de l'Europe du Sud est revendicatif, il est assistanciel dans l'Europe du Nord. Le syndicalisme est faible, revanchard, idéologique en Europe du Sud et fort, consensuel, pragmatique en Europe du Nord.

Les deux groupes, managers et syndicats finissent pas être invalidés. "Le syndicat ? A quoi ça sert  ?" me disent des manifestants rencontrés sur un rond-point, "ils sont de mèche avec le gouvernement". On rencontre ici la question de la désaffiliation sociale, du rapport à l'autre et la faiblesse du lien social étudiée notamment par Serge Paugam.

Comme le rôle des responsables politiques est de faire en sorte que la population soit homogène pour favoriser une vie paisible entre individus, on ne peut que proposer aux députés de réfléchir à une meilleure manière de faire converger syndicats et patronat vers une conception commune des relations de travail.

Cela passe peut-être vers un travail auprès des enseignants des grandes écoles.

Vincent Peillon en son temps avait proposé de  supprimer les grandes écoles ce qui lui avait probablement couté son poste de Ministre de l'éducation nationale qu'il a occupé de mai 2012 à avril 2014 sous la présidence de François Hollande, produit des grandes écoles, étant passé par HEC avant de faire l'ENA.

Ce souhait du ministre était peut-être trop radical et manquait sûrement de pertinence parce que le barrage à la diversité nait notamment de l'autocensure dans les têtes des profs et des élèves. Le prof pense que l'élève issu des milieux populaires , même d'un bon niveau, va à l'échec en tentant les concours de l'excellence et l'élève diminue ses ambitions, convaincu qu'il n'aura pas sa place dans une grande école.

Le désir de projet ne peut pas naitre faute de représentation dans les esprits d’où le travail sur la sémiotique institutionnelle de Richard Descoing par exemple , l'ancien patron de science po Paris, décédé en 2012, avec pour finalité la création d'un interprétant partagé.